Le dirigeant de la puissante centrale syndicale UGTT, Noureddine Taboubi, engagé dans un bras de fer inédit avec le gouvernement tunisien, a assuré à l’AFP être ouvert au compromis « mais pas à n’importe quel prix ».
Après le succès de la mobilisation du 17 janvier, qui a en partie paralysé l’activité dans le pays, l’UGTT vient d’appeler à une nouvelle grève générale les 20 et 21 février dans le secteur public. Il s’agirait de la troisième depuis novembre en Tunisie, où les fonctionnaires et les salariés des entreprises publiques représentent près d’un quart de la population active.
Les mouvements à répétition dans le secteur de l’éducation lui ont valu des critiques, et l’interruption massive des services publics le 17 janvier a semé le chaos dans les aéroports.
Mais M. Taboubi a assuré lundi que des négociations étaient toujours en cours, et qu’il restait quatre semaines pour parvenir à un accord.
« On ne veut pas la grève pour la grève », a affirmé M. Taboubi. « Nous souhaitons trouver des solutions. Nous avons annoncé une nouvelle grève dans un mois, tout en espérant que nous arriverons à trouver un compromis. Mais pas à n’importe quel prix ».
Face à une inflation qui a récemment atteint 7,5%, le syndicat réclame un maintien du pouvoir d’achat par des augmentations plus importantes que les 130 à 180 dinars (40 à 55 euros) étalés sur deux ans proposés par le gouvernement.
Il souhaite également des garanties contre les privatisations envisagées pour certaines des nombreuses compagnies publiques.
Le Premier ministre Youssef Chahed a assuré que les finances publiques ne permettaient pas d’accepter les demandes de l’UGTT.
Le syndicat reproche notamment au gouvernement de manquer d’initiative et de céder aux pressions du Fonds monétaire international (FMI) qui a accordé en 2016 un nouveau prêt de 2,4 milliards d’euros sur quatre ans à Tunis, en échange de vastes réformes.
« Nous aussi, nous avons des pressions de la base, vu la cherté de la vie », a souligné M. Taboubi.
Ces mobilisations sociales, les premières grèves d’une telle ampleur depuis des décennies, interviennent alors que le débat politique s’est crispé ces derniers mois à l’approche des élections législatives et présidentielle prévues fin 2019, dans lesquelles l’UGTT souhaite peser.
Malgré les avancées démocratiques après la chute de Zine el Abidine Ben Ali en 2011, et une récente reprise de la croissance, les dirigeants tunisiens peinent à répondre aux attentes sociales de la population, frappée par l’inflation et un chômage massif en particulier chez les jeunes et dans les régions défavorisées du pays.