La Cour européenne des droits de l’Homme (CEDH) a condamné mercredi l’Azerbaïdjan pour ne pas avoir respecté son arrêt de 2014 demandant la libération de l’opposant Ilgar Mammadov, qui était emprisonné selon elle pour des raisons politiques.
Ilgar Mammadov avait tenté de se présenter à l’élection présidentielle de 2013 mais avait été placé en détention provisoire puis condamné à sept ans de prison. Il a été libéré en août 2018, plus de quatre ans après l’arrêt de la CEDH demandant sa libération, et sa libération n’était pas « inconditionnelle », a souligné la Cour dans un communiqué.
Selon elle, l’Azerbaïdjan n’a pas agi « de bonne foi » ou de manière compatible avec « les conclusions et l’esprit » de l’arrêt qu’elle avait rendu.
Il s’agit du premier arrêt rendu par la Grande chambre de la CEDH dans le cadre d’une procédure prévue depuis 2010 pour les cas où les Etats membres du Conseil de l’Europe refusent de se conformer à un de ses arrêts.
Sur sa page Facebook, M. Mammadov a immédiatement réagi en saluant une « victoire décisive ». « La Grande Chambre de la Cour Européenne viens de dire que (…) le régime d’Ilham Aliev a violé ses obligations devant le Conseil de l’Europe », s’est-il réjoui.
En 2014, la CEDH avait jugé que les poursuites criminelles contre ce blogueur et militant politique, dirigeant du parti Alternative républicaine (Real), n’avaient pas de fondement légal et visaient à le faire taire.
Le Comité des ministres du Conseil de l’Europe, chargé de vérifier l’exécution des arrêts de la Cour, avait réitéré régulièrement au cours des années suivantes la demande de sa libération sans délai. Devant l’absence de réaction de Bakou, il avait à nouveau saisi la CEDH en décembre 2017.
M. Mammadov a finalement bénéficié en août 2018 d’une libération assortie d’une période de mise à l’épreuve puis, en mars 2019, la Cour suprême d’Azerbaïdjan a conclu qu’il avait purgé la totalité de sa peine et annulé les restrictions qui lui avaient été imposées.
Toutefois, sa libération en 2018 et l’arrêt de la Cour suprême « n’ont pas offert de redressement car, à l’instar des autres décisions internes, ces mesures ont confirmé la condamnation fondée sur les accusations abusives », a estimé la CEDH.
Elle note en outre que la libération de l’opposant est postérieure à la saisine de la Cour par le Comité des ministres du Conseil de l’Europe.
Au pouvoir depuis 2003 après avoir succédé à son père, le président d’Azerbaïdjan Ilham Aliev a remporté en avril 2018 une large victoire à l’issue d’un scrutin présidentiel marqué par un manque de pluralisme et entaché de « graves irrégularités » selon l’OSCE.