L’auteur présumé de l’incendie criminel d’un studio d’animation en juillet 2019 à Kyoto, dans l’ouest du Japon, qui avait fait 36 morts et 33 blessés, a été inculpé mercredi, ont annoncé les médias locaux.
Shinji Aoba, 42 ans, a été inculpé notamment pour meurtre, tentative de meurtre et incendie volontaire, selon plusieurs médias. Sollicité par l’AFP, le parquet de Kyoto n’était pas joignable dans l’immédiat.
Gravement brûlé lui-même dans l’incendie, M. Aoba avait dû être hospitalisé et son arrestation formelle par la police n’avait eu lieu qu’en mai dernier.
Ses blessures ont failli lui être fatales, et il a dû subir plusieurs greffes de peau, a récemment déclaré un de ses médecins au journal régional Kyoto Shimbun.
Il n’a par ailleurs retrouvé l’usage de sa voix qu’à l’issue d’une opération chirurgicale.
L’accusé aurait reconnu au moment de son arrestation les faits qui lui sont reprochés, expliquant à la police qu’il voulait « être en mesure de tuer beaucoup de gens en utilisant de l’essence », avaient alors rapporté des médias nippons.
Son mobile reste flou. M. Aoba n’avait aucun lien connu avec le studio Kyoto Animation (surnommé « KyoAni ») mais lui reprochait de lui avoir volé une idée de scénario, selon les médias.
D’après plusieurs témoignages, il avait fait irruption dans le bâtiment du studio en répandant de l’essence avant d’y mettre le feu en criant: « Vous allez mourir ».
Apte » à être jugé
L’homme avait déjà écopé d’une peine de plus de trois ans de prison pour avoir commis un vol dans une supérette en 2012, selon les médias.
Après avoir procédé à une évaluation psychiatrique, les procureurs ont conclu qu’il était « mentalement apte » à répondre des crimes qui lui sont reprochés, a rapporté la chaîne de télévision publique NHK.
La tragédie de KyoAni avait eu un vaste retentissement au Japon comme à l’étranger.
Le studio comptait beaucoup de jeunes salariés, et notamment des femmes. Ces jeunes professionnels portaient « l’industrie de l’animation japonaise sur leurs épaules (…). Des joyaux japonais ont été perdus », avait déclaré le président de l’entreprise Hideaki Hatta après le drame.
Les parents de plusieurs des victimes ont déclaré mercredi aux médias japonais que l’inculpation de M. Aoba n’adoucissait pas leur peine.
« Mes sentiments ne changent pas », a déclaré à la NHK Chieko Takemoto, dont le fils Yasuhiro, 47 ans, avait péri dans l’incendie.
« Quand je suis seule et que je pense à lui, j’ai envie de pleurer. Je suis tellement triste qu’il soit parti », a-t-elle ajouté.
Quoi que l’accusé dise lors son futur procès, « Yasuhiro ne reviendra pas », a lâché pour sa part le père de Yasuhiro. « Cette réalité ne changera pas, quel que soit le verdict ».
Violence aveugle
Fondé en 1981, KyoAni, réputé pour sa qualité, a produit des dessins animés souvent inspirés de mangas, dont « Munto », « Lucky Star », « La Mélancolie de Haruhi Suzumiya » ou encore « K-ON! ».
Le film d’animation « Violet Evergarden », qui était en production au moment de l’incendie, a fini par sortir en septembre dernier dans les salles japonaises, après plusieurs reports.
KyoAni était réputé pour le raffinement de sa production et attaché à son implantation dans l’ancienne capitale impériale du Japon, Kyoto, alors que la plupart des studios d’animation nippons sont basés à Tokyo.
Les tueries de masse sont rares au Japon, où la législation sur les armes est très stricte et le taux de criminalité relativement faible. Mais l’archipel est parfois le théâtre de déchaînements de violence aveugle.
Mardi, un homme de 30 ans a été ainsi condamné par un tribunal de Tokyo à la peine de mort pour avoir en 2017 assassiné et démembré les corps de neuf personnes qu’il avait attirées chez lui après les avoir approchées sur Twitter.
Avant celui de KyoAni, d’autres incendies criminels avaient endeuillé le pays, comme en septembre 2008 à Osaka (ouest) quand 16 personnes avaient été tuées dans un magasin de location de vidéos. L’incendiaire reconnu coupable a été condamné à la peine capitale en décembre 2009 et il est toujours actuellement dans le couloir de la mort.