Le premier tour de la présidentielle en Guinée-Bissau s’est tenu à la régulière quoi qu’en disent les alliés du président sortant, estime l’organe de supervision du vote. Reste à en connaître les résultats, avec pour enjeu majeur la stabilité du pays.
Les premiers résultats devraient être annoncés mercredi après l’arrivée dans la capitale des décomptes des régions et des îles, a dit lundi à l’AFP la porte-parole de la Commission nationale électorale (CNE), Mme Felisberta Vaz Moura.
Le premier tour « s’est bien déroulé sur l’ensemble du territoire national », a déclaré la porte-parole de cette commission réputée indépendante.
Un second tour, hautement probable, est prévu le 29 décembre.
« Nous sommes déterminés à tout faire dans la transparence », a-t-elle assuré.
Les électeurs de ce petit pays d’1,8 millions d’habitants étaient appelés dimanche à choisir leur prochain président parmi 12 hommes. La stabilité, indispensable pour combattre des maux comme la grande pauvreté, la corruption répandue jusque dans les classes dirigeantes et le trafic de cocaïne, est l’un des grands enjeux après des décennies de crise politique permanente.
Des échauffourées ont été signalées dans plusieurs localités, mais aucune violence majeure n’a été rapportée, et le dépouillement a commencé dès la fermeture des bureaux dimanche.
Le doute subsiste toutefois sur l’acceptation des résultats par tous les candidats, entretenant la crainte d’une tentative de coup de force dans un pays qui en a déjà connu beaucoup depuis son indépendance en 1974.
L’armée a promis de ne plus se mêler de politique, sept ans après son dernier coup d’Etat qui avait interrompu le processus électoral en 2012.
– « Bourrages d’urnes » –
En revanche, le camp du président sortant, José Mario Vaz, qui brigue un second mandat, a dénoncé un « bourrage d’urnes » dans plusieurs villes, et affirmé qu’il ne reconnaîtrait pas un résultat entaché d’irrégularités.
Il a mis en cause le Parti africain pour l’indépendance de la Guinée et du Cap-Vert (PAIGC), la formation historique et dominante au parlement à laquelle M. Vaz s’est confronté jusqu’au bout de sa présidence.
« C’est faux. Il n’y a pas eu de bourrage d’urnes », a objecté la porte-parole de la commission nationale en expliquant que le vote anticipé des militaires, jeudi, avait pu prêter à confusion.
« Tout se fait en présence des (représentants des) candidats. Il n’y a pas de vol possible », a-t-elle dit.
Les organisations internationales qui ont dépêché des observateurs sur place ne se sont pas encore prononcées publiquement sur la régularité du vote.
Le chef du PAIGC, ancien Premier ministre évincé par le président Vaz en 2015, Domingos Simoes Pereira, a dit qu’il respecterait le résultat.
– Voisins ouest-africains inquiets –
Si M. Pereira l’emportait, sa formation contrôlerait tant la présidence que le gouvernement, une situation qui devrait faciliter le retour d’une certaine stabilité dans un pays qui a vécu ces quatre dernières années au rythme des querelles entre le président Vaz et le PAIGC, lui-même affaibli par des dissidences.
Sous la présidence de M. Vaz, les chefs de gouvernement se sont succédé, suscitant l’inquiétude des pays ouest-africains qui ont multiplié les médiations.
Dans le même temps, les écoles sont restées fermées pendant des mois en raison de grèves à répétition des enseignants réclamant le paiement d’importants arriérés de salaires.
Et près de 70% des Bissau-Guinéens vivent toujours avec moins de 2 dollars par jour, malgré les promesses de M. Vaz de s’attaquer au fléau de la pauvreté, qui a favorisé l’implantation de trafiquants de drogue en provenance d’Amérique du Sud.
D’autres candidats espèrent tirer leur épingle du jeu, à commencer par Umaro Sissoco Embalo, à la tête d’une dissidence du PAIGC, ou encore de Nuno Nabiam, battu au second tour en 2014. Chassé par les militaires entre les deux tours alors qu’il était favori de l’élection de 2012, l’ex-Premier ministre Carlos Gomes Junior a lui aussi à nouveau tenté sa chance.