Le télescope spatial Cheops a quitté la Terre mercredi, après un report du lancement la veille, pour gagner son poste d’observation des exoplanètes et tenter de gravir une marche supplémentaire dans la compréhension de l’origine de la vie.
« La mission Cheops représente une étape pour mieux comprendre l’astrophysique de toutes ces planètes étranges que nous avons découvertes et qui n’ont pas d’équivalence dans le système solaire », explique Didier Queloz, prix Nobel 2019 de physique.
Près de 4.000 exoplanètes – orbitant autour d’une étoile autre que le Soleil – ont été détectées depuis que l’astrophysicien et son collègue Michel Mayor ont débusqué la toute première, 51 Pegasi b, il y a 24 ans.
Aujourd’hui, on estime qu’il y a dans la galaxie au moins autant de planètes que d’étoiles, soit à peu près 100 milliards. « Nous voulons dépasser la statistique et les étudier en détail », expliquait David Ehrenreich, responsable scientifique de la mission Cheops dirigée par la Suisse et l’agence spatiale européenne (ESA).
Pas toutes bien sûr. Mais Cheops va en observer à peu près 500 et ainsi composer « une photo de famille des exoplanètes », raconte Günther Hasinger, le directeur des programmes scientifiques de l’ESA.
Comment ? En observant les exoplanètes quand elles passent devant leur étoile en créant comme une mini-éclipse.
En comparant la lumière émise par l’étoile avant, pendant et après le transit de la planète, les astrophysiciens parviendront à déduire la taille et le rayon de la planète, avec une précision inédite.
Ces nouvelles données, combinées à des informations récoltées par les télescopes au sol sur la masse, permettront de mesurer la densité, paramètre essentiel pour déterminer la composition de la planète. Un critère fondamental pour définir la probabilité qu’une planète puisse héberger la vie.
– « étape émotionnelle » –
« La mission va également permettre de mesurer la quantité de lumière réfléchie par ces planètes. En analysant cette lumière on peut avoir une idée de la structure soit de l’atmosphère, soit de la surface », ajoute Didier Queloz.
Quand au Graal des astrophysiciens, comprendre l’origine de la vie ou la détecter sur une autre planète ?
« Ce n’est pas une question que l’on va résoudre avec Cheops, mais pour comprendre l’origine de la vie, on doit comprendre la géophysique de ces planètes », explique Didier Queloz. « C’est comme si on avait un grand escalier, on commence par la première marche ».
« Il faut beaucoup de paramètres pour que la vie puisse être possible », rappelle Günther Hasinger.
Le lanceur moyen Soyouz, dont c’est le troisième lancement de l’année, devrait décoller mercredi à 05h54, heure de Kourou (08h54 GMT), du Centre spatial guyanais.
Il emportera également le satellite d’observation de la Terre COSMO-SkyMed Second Generation, pour l’Agence spatiale italienne (ASI) et le ministère de la Défense italien. Et trois charges auxiliaires: Angels, premier nanosatellite financé par le CNES et intégralement produit par l’industrie française; Eyesat, également financé par le CNES; et Ops-Sat, pour le compte de l’ESA.
« Le lancement c’est un moment important, une étape émotionnelle mais le moment magique pour nous sera quand les données arriveront vraiment », avoue Didier Queloz.
Ce qui ne devrait pas tarder selon l’ESA, qui estime que « les premiers résultats de Cheops devraient nous parvenir assez rapidement, dans quelques mois ».