Avec un nombre inédit de femmes et le premier candidat ouvertement gay, la myriade de prétendants démocrates déjà en lice pour la présidentielle américaine affiche un autre record: déjà six époux pourraient devenir « First Gentleman », dont un, Chasten Buttigieg, qui a atteint une renommée soudaine à coups de tweets humoristiques.
La question s’était posée en 2016 pour Bill Clinton: quel nom lui donner si la candidate démocrate Hillary Clinton remportait l’élection, dans un pays où la « First Lady » est un titre officiel aux fonctions établies?
La démocrate s’est finalement inclinée devant Donald Trump mais en novembre 2020, le sujet pourrait redevenir d’actualité si un homme succède à Melania Trump.
Déjà, en campagne pour la primaire démocrate, l’image d’époux accompagnant leur femme candidate, souriants, presque toujours en retrait, s’est normalisée.
Mais si la plupart sont plutôt discrets, l’époux du jeune maire et premier candidat « millenial » Pete Buttigieg, Chasten, a vu sa popularité exploser à mesure que son mari grimpait (encore timidement) dans les sondages ces derniers jours.
Portraits et tribunes se multiplient pour parler de cet enseignant de 29 ans qui compte plus de 130.000 abonnés sur Twitter, marié à Pete Buttigieg depuis juin 2018. Au risque de friser l’overdose?
« Content que tout le monde commence à comprendre pourquoi je l’aime! », a réagi le candidat Pete Buttigieg –ex-militaire et maire de la ville de South Bend, dans l’Indiana– en retweetant un article du site Politico proclamant: « Chasten Buttigieg est en train de gagner la primaire des conjoints » pour 2020.
Humoristiques, pleins d’autodérision et apparemment spontanés, les tweets de Chasten Buttigieg (prononcer « Boutidjedj »), professeur de théâtre et sciences humaines, font souvent mouche.
Et il n’hésite pas à employer l’arme ultime en ligne: les photos d’adorables animaux. Comme lorsqu’il a plaisanté en écrivant, « on est en train de me remplacer », en montrant Pete Buttigieg et l’un de leurs chiens, endormi dans ses bras.
Ce tweet avait motivé un autre « First Gentleman » potentiel à réagir avec humour: Douglas Emhoff, époux de la sénatrice Kamala Harris, 54 ans.
« Ok, et moi qui pensais que j’avais un assez bon style pour un conjoint sur Twitter… bien joué @Chas10Buttigieg! » avait-il écrit, bon joueur.
Ancienne procureure de Californie, Kamala Harris a épousé en 2014 cet avocat, père divorcé de deux enfants qui affiche son admiration pour la candidate.
– Des Premières dames « superwomen » –
Autres premières: au moins deux candidates ont rencontré leur conjoint actuel après un divorce: Elizabeth Warren et Tulsi Gabbard.
Cinquième dans les sondages, la sénatrice progressiste Warren, 69 ans, a raconté comment elle avait demandé la main de Bruce Mann –aujourd’hui professeur de droit à Harvard– avant de l’épouser en 1980. Elle aussi était alors une jeune enseignante en droit, mère divorcée de deux enfants.
Arrivant en bas des sondages, la jeune élue de la Chambre des représentants et ex-militaire Tulsi Gabbard, 37 ans, a épousé en secondes noces un vidéaste, Abraham Williams.
John Bessler, professeur en droit et époux de la sénatrice du Minnesota Amy Klobuchar, 58 ans, apparaît aussi régulièrement à ses côtés dans les meetings mais reste une présence discrète. De même pour l’époux de la sénatrice Kirsten Gillibrand, 52 ans, le Britannique professionnel de la finance Jonathan Gillibrand.
Soit une véritable galerie de possibles « First Gentlemen », qui pourrait bien révolutionner la traditionnelle image d’une Maison Blanche où la Première dame se charge d’ordinaire de choisir la porcelaine ainsi que les bonnes causes qu’elle veut promouvoir.
L’un des candidats, le sénateur Cory Booker, 49 ans, rompt aussi à sa façon la tradition puisqu’il était encore récemment célibataire. Il a vient d’officialiser sa relation avec l’actrice Rosario Dawson mais le mariage n’est pas encore en vue.
« Depuis plus de 200 ans, les Américains attendent de l’épouse du président qu’elle s’habille d’une certaine façon, qu’elle se conduise d’une certaine façon, qu’elle parle d’une certaine façon », explique Katherine Jellison, professeur d’Histoire à l’université de l’Ohio. Surtout depuis les années 1950, « nous attendons de nos Premières dames qu’elles soient pratiquement des +superwomen+ ».
« Je crois qu’on aurait moins d’attentes de la part d’un homme dans cette position et cela pourrait créer un précédent », analyse-t-elle. « Avoir un +First Gentleman+ pourrait donner aux Américains l’opportunité de revoir les attentes excessives envers le conjoint d’un président et permettre aux prochains, quel que soit leur sexe, de ne pas avoir à tenter d’être à la hauteur de ce rôle de +Parfait Conjoint+ ».