Le président vénézuélien Nicolas Maduro a ordonné jeudi la fermeture de la frontière terrestre avec le Brésil et menacé de fermer celle avec la Colombie où se rend l’opposant Juan Guaido pour tenter de faire entrer l’aide humanitaire américaine.
« J’ai décidé qu’à partir de 20H00 (00H00 GMT) ce jeudi la frontière terrestre avec le Brésil restera totalement fermée jusqu’à nouvel ordre », a déclaré le chef de l’Etat lors d’une réunion avec le haut-commandement militaire.
Le dirigeant socialiste a également déclaré qu’il « évalue actuellement une fermeture totale de la frontière avec la Colombie » face à ce qu’il considère comme des « provocations » de la part du président colombien Ivan Duque, conjointement avec le président américain Donald Trump.
« Je tiens M. Ivan Duque pour responsable de toute violence à la frontière », a ajouté M. Maduro, qui a également appelé l’armée colombienne à ne se prêter à aucune agression contre le Venezuela.
Plus tôt, l’opposant Juan Guaido, reconnu président par intérim par une cinquantaine de pays, a quitté Caracas pour se rendre avec des partisans à 900 km de là, dans l’Etat de Tachira (ouest), à la frontière avec la Colombie. « C’est confirmé, il est en route », a indiqué à l’AFP un collaborateur de l’opposant.
Des journalistes de l’AFP ont constaté qu’une dizaine de véhicules avaient quitté en fin de matinée Caracas, mais sans pouvoir dire si M. Guaido se trouvait précisément dans ce convoi.
Une autre caravane composé de plusieurs autocars a également quitté la capitale avec à son bord des députés d’opposition. Elle a subi des tirs de gaz lacrymogène de la part de militaires qui avaient placé des obstacles pour empêcher sa progression sur une route de l’Etat de Carabobo (nord), mais sans incidents graves.
Mercredi, Nicolas Maduro, qui nie toute crise humanitaire dans le pays, avait une nouvelle fois dénoncé un « show » politique et répété que Donald Trump projetait une intervention militaire pour le renverser.
Le vice-président du Brésil, Hamilton Mourao, a affirmé à l’AFP qu’une intervention militaire américaine au Venezuela « n’aurait aucun sens » et que les menaces de Washington étaient « de l’ordre de la rhétorique ». Et un porte-parole du président brésilien d’extrême droite Jair Bolsonaro, a écarté tout risque de « frictions » à la frontière avec le Venezuela.
– Par bateau –
Des manifestations pro-Guaido et pro-Maduro sont également prévues dans tout le Venezuela samedi, journée qui s’annonce sous haute tension.
M. Guaido, qui a choisi pour l’entrée de l’aide la date symbolique du 23 février, un mois tout juste après s’être proclamé président par intérim du pays, a affirmé que l’aide entrerait « quoi qu’il arrive ».
Sur l’île néerlandaise de Curaçao, un avion transportant 50 tonnes de vivres et de médicaments est arrivé jeudi en provenance de Miami, salué par une dizaine de Vénézuéliens présents sur place qui ont entonné l’hymne national, ont constaté des journalistes de l’AFP. Un bateau a été affrété dans le but de convoyer cette aide vers le Venezuela, distant de 65 kilomètres de l’île caribéenne.
Mais la façon dont Juan Guaido et ses partisans comptent concrètement rompre le blocus frontalier mis en place par le gouvernement reste la grande inconnue.
Outre la fermeture de la frontière avec le Brésil, les vols et liaisons maritimes sont suspendus avec Curaçao et le pont de Tienditas, reliant Cucuta à Urena, dans l’Etat de Tachira, est toujours barré de conteneurs.
– « Hand off » contre « Aid Live » –
Comme un symbole du bras de fer qui se joue entre les deux hommes, deux concerts, l’un pour demander l’acheminement de l’aide, l’autre pour la refuser, auront lieu vendredi à quelque 300 mètres de distance, de part et d’autre du pont de Tienditas.
« Venezuela Aid Live », le concert organisé par le milliardaire britannique Richard Branson pour récolter des dons, aura lieu vendredi à Cucuta, en présence des présidents colombien, chilien et paraguayen.
Un porte-parole des organisateurs, Fernan Ocampo, espère 250.000 spectateurs, alors que 1.500 policiers et militaires seront déployés pour assurer la sécurité de l’événement.
Parmi les stars internationales attendues : les Espagnols Alejandro Sanz et Miguel Bosé, le Dominicain Juan Luis Guerra, les Colombiens Carlos Vives et Juanes, le Portoricain Luis Fonsi, ainsi que plusieurs célébrités vénézuéliennes.
« Les artistes qui se produiront en Colombie doivent savoir qu’ils commettent un crime, ils donnent leur aval à une intervention militaire », a prévenu Nicolas Maduro.
L’affiche de « Hand off Venezuela » (Pas touche au Venezuela), le contre-concert organisé dès vendredi et pour trois jours par le gouvernement, n’est en revanche pas connue.